Lorsqu’au théâtre, une même pièce nous fait rire et pleurer, on peut souvent dire qu’elle est une belle réussite. C’est le cas en ce début d’année de « Libres sont les papillons », jouée au théâtre Rive gauche, dans le quartier de Montparnasse. Cette « comédie » de Léonard Gershe, adaptée par Éric-Emmanuel Schmitt et mise en scène par Jean-Luc Moreau, m’est allée droit au cœur. Le jeu de Julien Dereims, Anouchka Delon, Nathalie Roussel et Guillaume Beyeler n’y est sans doute pas pour rien.
En apparence, ils sont normaux ; en réalité, ils cachent un secret. Quentin, vingt ans, vient de s’installer dans un studio à Paris. Sa voisine, Julia, même âge, libérée et rigolote, a envie d’une aventure avec lui tandis que Florence, la mère protectrice, rôde pour faire revenir son fils à la maison. Tous aiment, mais aiment maladroitement, en se faisant mal… Libres sont les papillons ? Une comédie aussi drôle que touchante, un véritable classique contemporain de Broadway adapté dans le Paris d’aujourd’hui par Éric-Emmanuel Schmitt.
Le rideau s’ouvre sur une situation légère et presque banale : un jeune homme fait de la musique dans son appartement. Sa mère l’appelle, il est agacé, et il ne va pas tarder à faire connaissance avec sa jolie voisine. La situation est amusante mais les premières scènes ne nous emportent pas encore totalement. On se dit que la pièce est sympa mais on est alors encore loin de savoir par quel ascenseur émotionnel elle va nous faire passer !
Il ne faut, cela dit, pas plus longtemps pour percevoir comme Julien Dereims est bluffant en Quentin. Il incarne un personnage hors du commun, intelligent, désireux de vivre et sans cesse sur le fil. Sa partenaire, sur scène comme à la ville, est Anouchka Delon. La jeune femme est pétillante et prête à Julia ses faux airs de Kate Middleton (vous ne trouvez pas ?). Le duo fait connaissance, se cherche, se trouve finalement assez vite.
Puis arrivent la réalité, qui nous fait quelques instants basculer dans le drame, et, avec elle, la mère de Quentin, protectrice à l’extrême. Nathalie Roussel incarne une mère qui a une certaine noblesse, de l’humour mais qui n’a pas encore tout compris et qui, envahissante, ferait volontiers retourner son fils dans son nid, comme le bébé qu’il n’est plus.
Mais l’histoire n’est pas banale. Les textes sont profonds et travaillés. Il n’y a pas de phrase pour rien. Les sentiments des personnages explosent sur scène. Des réparties sont très drôles mais quelques scènes sont déchirantes. On voit alors les relations complexes entre une mère et son fils, entre un homme et une femme… mais pas seulement.
« Libres comme des papillons » nous parle de la maturité, du soutien que l’on porte à ses proches, de la dépendance et s’avère presque être une ode à la franchise. Les personnages sont analysés. Tout semble si réel que chacun s’identifie forcément au moins à un fragment de ce qui nous est donné à comprendre.
Les comédiens sont totalement investis. On vit avec eux les tensions dramatiques comme les moments drôles. Si la pièce est décrite comme étant une comédie, on est loin du vaudeville.
Un petit mot pour le décor : il est unique mais très réussi. J’ai trouvé très réussie cette reconstitution de studio parisien.
Dans ce grand huit émotionnel, il arrive un moment où il n’est plus forcément possible de lutter contre les larmes qui roulent sur les joues. J’ai quitté la salle en pleurant. Je n’ai même plus pensé à l’heure ni à la fatigue de la journée. Je n’ai retrouvé la notion du temps qu’en voyant des chiffres sur les écrans du métro. Monsieur comme moi pensons vraiment que « Libres sont les papillons » fait partie de ces pièces dont on se souvient longtemps. L’avenir le dira !
Vous l’aurez compris : j’ai beaucoup beaucoup aimé ce spectacle et vous le recommande chaudement.
Libres sont les papillons
Au moins jusqu’au 29 mai 2016
Du mardi au samedi à 21h
Matinée le dimanche à 15h
Tarifs guichet : 36€ (carré or), 30€, 25€, 18€, 12€
Théâtre Rive gauche
6, rue de la Gaîté
75014 Paris
Tél. : 01 43 35 32 31
www.theatre-rive-gauche.com
Merci pour cette critique ça me donne vraiment envie d’y aller !
Je la note sur ma liste des pièces avoir en 2016. Ton article m’a sacrément donne envie:)
Super ! J’espère que tu aimerais autant que moi 🙂
Joli décor, mise en scène vivante, on sourit quelquefois.
Les deux personnages principaux jouent bien avec un surjeu pour la jeune fille qui donne d’ailleurs l’impression d’être plus explosive qu’elle ne veut le montrer. (On verra plus tard dans sa carrière…) La mère aussi surjoue un peu dans son rôle de protectrice castratrice, sauf à la fin où son ton s’affine. Le fils est impeccable, très crédible, touchant. En revanche, l’autre zigoto n’est pas à la hauteur du personnage qu’il devrait figurer ; il semble ballot alors qu’il devrait être un Don Juan opportuniste et menfoutiste.
Et le texte est gentillet, pétri de bons sentiments dans une situation presque banale à propos du handicap, de l’amour maternel et de la prise de liberté. On devine souvent « le mot » qui va suivre. On espère toujours autre chose mais on voit les gros sabots qui avancent pesamment ou au contraire, qui étonnent car il y a des « manques ». Par exemple, aucune indication du changement de point de vue de la mère..
Tiens, à un moment, la jeune fille dont on sait qu’elle n’est pas cultivée a une expression qui ne relève pas du tout de son niveau de langue. Quelque chose comme « Je ne m’aventurerais pas à… » C’est un bug, nan ?
L’ensemble n’est pas très crédible. Particulièrement quand la jeune fille revient au bras d’un autre sans état d’âme, et ne cesse de l’enlacer et de se faire peloter devant son amoureux d’un jour et sa mère devant laquelle elle avait précédemment une attitude plus retenue. Qui fait ça ?! Tout ce cinéma pour bien nous faire comprendre, nous montrer, nous prouver sa légèreté ou son lunatisme. Dans le cas où on ne l’aurait pas bien vu, allez, encore un bisou ! Qu’elle doive faire sa valise nous aurait suffit, monsieur le metteur en scène…
Personnellement, je ne me suis pas profondément ennuyée mais avec cette impression d’avoir quand même perdu mon temps.
Merci d’avoir pris le temps de faire part de vos impressions.
Les personnes un peu étranges existent dans la vraie vie donc cela ne m’a pas dérangée…
Mais chacun ses goûts et son histoire personnelle.
J’ai vu venir le revirement de la mère mais il est sûr que tout le monde n’a pas la maturité affective suffisante pour évoluer… De nombreuses personnes sont comme elle mais resteront pénibles toute leur vie… J’ai pris cela pour un message pour faire grandir les spectateurs !
Bonne journée 🙂